Pour Motena, une maison de repos et de convalescence de Roulers, la hiérarchie a peu d'importance. En revanche, le leadership stratégique y est valeur cardinale. Sa DRH, Trui Vandecasteele, en a fait une priorité depuis plusieurs années.
Texte: Patrick Verhoest
Le plus important pour Motena, c'est la satisfaction du client. Raison pour laquelle cette maison de repos et de convalescence de Roulers a pris ce nom qui dérive d'une notion japonaise, omotenashi, qui signifie hospitalité suprême. C'est dans ce contexte que la DRH a commencé à plancher sur le leadership stratégique. «Pour nous, ce concept a un sens précis: nous nous efforçons d'atteindre l'équilibre entre l'empathie avec les salariés et la réalisation des objectifs de l'organisation. Dans le secteur des soins aux personnes, il est naturel de se dévouer pour ses patients. Nous attendons de nos leaders qu'ils fassent la même chose pour leurs collaborateurs. C'est la stratégie de notre groupe.»
Presque tous les leaders de Motena ont commencé leur carrière sur le terrain. «Nous n'accordons pas beaucoup d'importance à la hiérarchie», souligne Trui Vandecasteele. «Nous nous inspirons de la chaleur humaine qui est la marque des soins aux personnes. Les leaders doivent susciter le dialogue, être proches et accessibles. Nous souhaitons que chacun s'exprime franchement. La porte de celui qui se situe plus haut dans l'organigramme est toujours ouverte. Les lignes de communication sont donc directes et proches. La flexibilité est essentielle. La crise sanitaire l'a bien montré… Dans notre organisation, les collaborateurs cherchent ensemble des solutions. Cela dit, les leaders doivent oser trancher, c'est l'une de leurs compétences essentielles. C'est encore plus nécessaire dans les équipes autogouvernées, comme celle qui s'occupe du traitement des salaires. Ici, le leader doit donner des conseils, coacher, fournir un feed-back mais surtout, assumer les responsabilités finales et valider les décisions.»
Trui Vandecasteele distingue les rôles de leader, de manager, d'entrepreneur et de coach. «Nous nous efforçons de disposer de chacun de ces rôles dans toutes les équipes. Si le chef d'équipe est plutôt un manager et un leader, nous nous efforçons de lui adjoindre des collègues qui ont un talent de coach. Nous avons commencé par interroger les responsables sur leur rôle préféré. Nous avons ainsi détecté les forces de chacun d'entre eux et leurs marges de progression. Ceci, pour les aider à s'améliorer. Nous voudrions que chaque leader possède en lui ces quatre rôles.»
La rétention est l'une des raisons qui poussent Motena à travailler sur le leadership. «Les salariés travaillent volontiers pour des leaders qui expriment la culture de l'entreprise et donnent l'exemple. Ce qui leur donne l'envie de rester chez nous. C'est pour cette raison que nous avons démarré ce projet.» Le programme de leadership stratégique commence par un questionnaire soumis au leader et à sa hiérarchie. Le score est analysé avec le psychologue de Motena. Sur cette base, l'organisation conçoit un programme de développement individuel. Trui Vandecasteele: «Nous évitons d'adopter une approche uniforme parce que tous nos leaders sont différents. Nous comptons notamment sur la technique de la complémentarité des pairs: celui qui est fort dans un domaine est associé à quelqu'un d'autre qui a un profil différent. Ces duos mangent ensemble, se promènent, se réunissent et apprennent l'un de l'autre. L'investissement en temps est réel mais la richesse que nous en retirons est colossale. Nous souhaitons offrir à nos managers une large gamme de formations dans lesquelles ils peuvent puiser à volonté.»
Le programme de leadership a été ralenti par la crise sanitaire. «Nos leaders ont dû affronter une charge de travail beaucoup plus lourde à cause du coronavirus. Du coup, la formation a été reléguée à l'arrière-plan. Par la suite, il n'est pas facile de relancer la machine. Après deux ans de durs efforts, certains d'entre eux sont épuisés. Nous leur venons en aide. Nous leur offrons la possibilité de s'adresser à un thérapeute, à nos frais. Il est clair que la crise les a soumis à une forte pression. D'où notre volonté de donner un coup de pouce à ceux qui le souhaitent. Ce programme est fondé sur l'anonymat, sauf si le coach et le manager concerné marquent leur accord pour que nous en parlions en interne.»
Motena se charge le plus possible elle-même du recrutement des leaders. Ainsi, les responsables infirmiers potentiels suivent un prétrajet pour identifier et renforcer leurs compétences en leadership. D'autres candidats prometteurs ont la possibilité de tester concrètement leurs aptitudes. «En fait, nous demandons aux managers de désigner ceux qui ont des capacités particulières dans ce domaine», assure Trui Vandecasteele. «Et nous proposons un plan de développement personnel à ceux qui déclarent leur ambition.» Mais ce n'est pas toujours facile: «Nos candidats sont des soignants. Quand vous suivez une formation, vous avez automatiquement moins de temps à consacrer à vos patients. Ce qui est parfois difficile. Tout le problème est de trouver un équilibre.»
Trui Vandecasteele veut tout faire pour approfondir le programme de leadership stratégique. Elle souhaite d'ailleurs le compléter par plusieurs actions. «Je pense au feed-back, à la marque d'employeur et à l'invitation de conférenciers inspirants. J'ai aussi envie de faire témoigner des salariés de Motena sur leur parcours dans notre organisation. Par ailleurs, nous faisons aussi attention de laisser le choix aux managers. Ils puisent dans les instruments que nous mettons à leur disposition ceux qui les intéressent vraiment.» ¶
Trui Vandecasteele
Fonction
DRH de Motena
Chaque jeudi dans votre boîte de réception.